Un septuor, six musiciens, un jongleur, des plumes et des balles blanches, des mots et des sons manipulés, une part faite au principe d’indétermination, (celle du diable dans le détail ?), ce n’est pas le geste qui déclenche ou modèle le son mais son résultat, une partition, « Dels dos principis », un petit hommage à Yves Rouquette poète de langue occitane, une dédicace à un ami Patrick Millet, comme lui récemment disparu.
Dels dos principis – Des deux principes
Septuor avec jongleur [fl-cl-pno-perc-vl-vlc-jongleur] durée 32 mn
Dédié à Patrick Millet, compositeur
Commande IRCAM, Centre Pompidou
Création festival Musica Strasbourg 30 septembre 2015
Jérôme Thomas, jonglage
Ensemble L’instant donné
Augustin Muller : réalisation informatique musicale, Ircam
Norbert Schnell Frédéric Bevilacqua : conseil scientifique équipe ISMM, Ircam
Emmanuel Fléty, Alain Terrier : conception et construction des balles augmentées, Ircam.
Je connais depuis longtemps le jongleur Jérôme Thomas. Nous avons joué ensemble, dans les années 90, au sein d’un trio piano, jonglage et percussion que nous formions avec le tambouriniste Carlo Rizzo. L’une des créations du trio fut programmée au Festival Musica de Strasbourg en 1998. J’ai par ailleurs invité Jérôme Thomas à participer depuis à plusieurs de mes créations dont « Le livre des traditions » pour octuor ; œuvre qui nous fut commandée conjointement avec Luc Ferrari par la WDR de Cologne.
Ces expériences mettaient en jeu deux lignes qui ne cessent de m’animer : d’une part le travail commun en « atelier » où se croisent des personnalités, des traditions, des manières d’inventer et des disciplines d’ordinaire séparées ; d’autre part la question de l’écriture du geste, en l’occurrence du geste jonglé, intégrée dans la composition à l’égal des autres parties instrumentales. Il était logique que ces « recherches » se développent un jour, par le truchement des nouveaux outils technologiques et de l’informatique musicale, dans une forme plus intégrée, où les caractéristiques gestuelles puissent être traduites, manipulées, « composées » en une véritable partition de musique de chambre.
Ce qui n’était pas possible alors, le devient aujourd’hui. Concevoir un nouveau projet d’écriture où l’un des arts du cirque, le jonglage, considéré pour sa musicalité – non seulement celle du geste lui-même mais aussi celle du résultat sonore qu’il produit grâce aux balles augmentées de capteurs – s’insère dans un ensemble de six musiciens, ceux de « L’instant donné » habitués à jouer sans chef, m’est alors apparu comme une étape naturelle de ce compagnonnage depuis longtemps engagé avec la créativité et la curiosité d’esprit de Jérôme Thomas.
Les données fournies par les capteurs de mouvement embarqués dans les différentes balles, et dans d’autres objets manipulés par le jongleur, sont le préalable à l’écriture d’une partition.
Selon les possibilités de reconnaissance de la position des balles dans l’espace, de contrôle des divers paramètres et de « sonification » des mouvements, – qui ont fait l’objet de la phase de recherche en ateliers à l’Ircam – des matériaux sonores viennent structurer « l’orchestration » d’un espace électro-acoustique joué par le jongleur à travers des haut-parleurs placés sur scène, et formant une scénographie de l’écoute et du regard où le corps est à l’avant-garde.
Par ailleurs, l’écriture pour les six musiciens de l’ensemble, qui ne fait, elle, intervenir aucun support technologique, dessine un espace acoustique propre. De fait, les rapports entre ces deux espaces apparaissent comme l’élément constitutif de la dramaturgie de la pièce. On « voit », certes, les outils du jongleur, leur manipulation et la gestuelle qui les anime, mais l’espace du concert, leur confère une sorte de « devenir instrumental ».
Dès lors leur statut est moins celui d’une traduction, d’une illustration ou d’un parallélisme virtuose entre le son et le geste, que celui d’une circulation d’énergie du geste vers le son, comme si naissait sous nos yeux, mais pour nos oreilles, un langage du corps tendu vers l’expression de la forme musicale où il est pris.
Ce n’est pas le jongleur qui « déclenche » par son action l’espace sonore (fragments de textes, sons électroniques ou instrumentaux), mais bien le mouvement des balles – principe d’indétermination – ou des objets, qui composent conjointement cet espace acoustique dans l’espace visuel.
En d’autres termes, ce n’est pas le geste qui déclenche ou modèle le son mais son résultat.
Dels dos principis – 2ème version sans jongleur
Dans cette deuxième version, sans électronique en temps réel et jongleur, six musiciens, une part faite au principe d’indétermination, (celle du diable dans le détail ?), une partition à la dramaturgie diffuse où le geste instrumental traduit la mémoire d’une présence absente, « Dels dos principis », un petit hommage à Yves Rouquette poète de langue occitane, une dédicace à un ami Patrick Millet, comme lui récemment disparu.
Septuor [fl-cl-pno-perc-vl-vlc] durée 32 mn
Dédié à Patrick Millet, compositeur
Commande IRCAM, Centre Pompidou ;
Création festival Musica Strasbourg 30 septembre 2015
La première version était porteuse d’un ensemble d’expériences mettant en jeu deux lignes qui ne cessent de m’animer : d’une part le travail commun en « atelier » où se croisent des personnalités, des traditions, des manières d’inventer et des disciplines d’ordinaire séparées ; d’autre part la question de l’écriture du geste, en l’occurrence du geste jonglé, intégrée dans la composition à l’égal des autres parties instrumentales. Il était logique que ces « recherches » se développent un jour, par le truchement des nouveaux outils technologiques et de l’informatique musicale, dans une forme plus intégrée, où les caractéristiques gestuelles puissent être traduites, manipulées, « composées » en une véritable partition de musique de chambre.
Dans la deuxième version, en l’absence du geste jonglé est demeuré une scénographie de l’écoute et du regard où le corps est à l’avant-garde. L’écriture pour les six musiciens de l’ensemble, qui ne fait, elle, intervenir aucun support technologique, dessine un espace acoustique propre mais qui garde le souvenir d’un « espace orchestral visuel» comme une sorte de dramaturgie de l’absence en une circulation d’énergie du geste vers le son. Tout se passe comme si naissait sous nos yeux, mais pour nos oreilles, un langage du corps tendu vers l’expression de la forme musicale où il est pris.
En d’autres termes, ce n’est pas le geste qui déclenche ou modèle le son mais son résultat.
Dels dos principis – Von zwei Prinzipien (deutsch)
Kompositionsauftrag des Ircam – Centre Pompidou
Deutsche Erstaufführung
Zweite Version. Septett für Flöte, Klarinette, Geige, Cello, Klavier, Schlagwerk und einen (abwesenden) Jongleur
Solisten – Mitglieder der Meininger Hofkapelle
Dirigent – Peter Leipold
04.04.2019, 19.30 Uhr – Großes Haus
Diese Komposition ist Teil eines Zyklus, der sich auf das mit der Dramaturgin und Librettistin Elisabeth Gutjahr geschriebene zweisprachige Hörspiel CORRESPONDANCE – KORRESPONDENZ gründet, das anlässlich des Festivals Musica Strasbourg 2013 uraufgeführt und 2014 in Donaueschingen in einer Version mit Jongleur abermals zur Aufführung gebracht wurde.
Die erste Version von DELS DOS PRINCIPIS beinhaltet eine Reihe von Erfahrungen, die mich immer wieder anregen: Zum einen die gemeinsame « Werkstatt »-Arbeit mit Persönlichkeiten, Traditionen, Erfindungsmethoden und Disziplinen, die normalerweise selbständig und voneinander getrennt funktionieren ; auf der anderen Seite die Frage nach der Komposition der Gestik, in diesem Fall die des Jonglierens, das den Instrumentalteilen ebenbürtig in das Musikwerk eingehen sollte. Es war fast selbstverständlich, dass sich diese Recherchen eines Tages mit Hilfe der technologischen Instrumente und der musikalischen Informatik so weit entwickeln würden, dass diese Gesten in eine regelrechte Kammermusikpartitur « einkomponiert » werden können.
In der hier präsentierten Version von DELS DOS PRINCIPIS, ohne Jongleur und zeitgleiche Elektronik, folgen sechs Musiker einem besonderen Prinzip der Unbestimmtheit, bei dem der Teufel im Detail steckt – es handelt sich um eine Partitur mit einer ganz eigenen Dramaturgie, deren instrumentaler Gestus in Erinnerung an einen abwesenden Mitspieler und an dessen „Bewegungskunst mit Klangkugeln“ stattfindet…
Das konzertante Stück ist auch eine Hommage an den okzitanischen Dichter Yves Rouquette und an Patrick Millet, Freund und Komponist.